« Story a day » : 26 mai 2015

(Sans titre)

Cabine téléphonique anglaiseLa vie est faite d’une multitude de petits détails qui, comme dans les peintures impressionnistes, complètent et font partie intégrante du grand tableau. Elle s’en rendait compte en cette belle matinée de printemps.
La peluche du lapin avait pris la poussière de l’étagère. Une épée en mousse était coincée entre le lit et le mur. Lorsqu’elle ouvrit le placard, une avalanche de Playmobil lui tomba sur les pieds.
Son casque stéréo, le bleu avec lequel il la faisait rire en faisant parfois les oreilles de Mickey, était encore branché sur l’Ipod. Elle l’alluma et écouta quelques instants les yeux fermés. Les mots hachés du rappeur ne lui procuraient pas le même plaisir que celui qu’elle voyait sur le visage de son fils quand il l’écoutait.
Elle s’accrochait à ses détails pour ne pas penser. Il était parti pour une semaine en voyage scolaire en Angleterre. Et elle ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter.
– Envoie-moi un message quand tu arrives.
– Mais Maman, je ne sais pas si ils auront Internet dans la famille où je serai. Et puis personne ne fait ça !
Elle avait baissé les yeux.
Le soleil brillait et passait par le prisme suspendu devant la fenêtre que lui avait offert son père pour ses dix ans. Un arc-en-ciel était projeté au plafond. Elle s’allongea sur son lit.
Il avait tellement grandi. Ses câlins de petit garçon lui manquaient. D’autres choses les avaient remplacés. Des regards complices, des blagues et quelques conversations intimes sur la vie.
C’était la première fois qu’il allait aussi loin, aussi longtemps.

Elle se releva, alla chercher l’aspirateur et commença à enlever la poussière des étagères où trônaient les trophées de karaté. C’est là qu’elle la découvrit.
Une enveloppe.
« Pour toi Maman – mai 2015. »

« Je sais que tu ne pourras pas t’empêcher de nettoyer et de ranger ma chambre pendant que je ne serai pas là. Je sais que tu trouveras facilement ce mot. J’ai juste ? »
Elle éclata de rire.
« Maman, je voulais juste te dire que je suis super content d’avoir la chance de partir avec mes copains en Angleterre. Je sais que ce voyage coûtait cher. Et je sais aussi que tu vas être inquiète tous les jours jusqu’à mon retour. Et je te suis reconnaissant de m’avoir tout de même laissé partir. Sache que moi aussi j’ai peur. Sache aussi que tu vas me manquer. I love you, Mom ! »
Elle se rendit compte trop tard qu’elle essuyait ses larmes avec le chiffon de la poussière.
Un pouffement de rire dans l’entrebâillement de la porte la fit sursauter.
– Hihi, Maman, elle a la joue toute cracra ! Je vais le dire à Papa !
Elle sauta sur ses pieds et partit dans une course poursuite avec sa fille. Des éclats de rire résonnèrent dans toute la maison.


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