« Story a day » : 27 mai 2015

Des journées comme ça

gouttes d'eau sur le sol« Mais qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu ? »
Des enfants qui s’étaient enfermés à clé dans leur chambre pour ne pas avoir à faire leurs devoirs. Un mari en conférence téléphonique dans son bureau et qui empêchait tout argumentation avec ses enfants. Et maintenant un raz-de-marée dans la cuisine : le lave-vaisselle avait lâché. À quatre pattes, elle était en train d’éponger avec une serpillère.
Et sa voisine, toujours pimpante, qui arrivait à tout gérer de main de maître : son travail indépendant, son mari en déplacement, ses enfants dans trois écoles différentes. Le tout sans une mèche de travers et en talon aiguille.
Et elle, toute transpirante, avec son jean troué et trempé, son vieux T-Shirt Marilyn Monroe décoloré, on ne pouvait pas faire plus glamour !
Une sonnerie assourdissante se fit entendre dans toute la maison. Une fumée âcre se dégageait du salon. Elle se précipita : les rideaux, trop près de la lampe avaient pris feu. Elle les tira rapidement et étouffa les flammes avec la serpillère.
Son mari sortit en courant de son bureau. Les enfants se précipitèrent aussi. Le spectacle était pitoyable : une femme, les yeux rouges, une serpillère humide dans une main, des rideaux en lambeaux dans l’autre, le rimmel dégoulinant et les cheveux collés à ses joues.
Le mari coupa l’alarme. L’un des enfants prit la serpillère pour la remettre dans le seau. L’autre prit le rideau pour le jeter. Le mari vint prendre la main de sa femme et la conduisit sur le canapé. Elle hoquetait. Ces larmes coulaient sans qu’elle ne puisse les arrêter. Ses enfants s’assirent à côté d’elle et l’étreignirent tendrement. Son mari lui baisa le front.
Il y eut un échange de regard entre les deux enfants. Ils acquiescèrent ensemble et s’éclipsèrent. Le mari s’assit à côté d’elle. Elle vint se recroqueviller contre sa poitrine. Il lui caressa les cheveux. Un moment passa.
– C’est un peu tôt pour votre anniversaire de mariage mais on pense que c’est le bon moment.
Les enfants tendaient à leurs parents une enveloppe.
« Quoi encore ? » ne put-elle s’empêcher de penser. Son mari intrigué prit l’enveloppe. Il la lui tendit pour qu’elle l’ouvre.
Ses mains se mirent à trembler lorsqu’elle vit les billets. Deux billets aller-retour pour Lima, Pérou.
Son rêve. Partir à la découverte des anciennes civilisations avec uniquement un sac à dos et de bonnes chaussures de marche.
– Mais c’est de la folie ! Comment avez-vous payé ça ? Et puis même si on part, comment va faire votre père pour prendre des jours avec tout le travail qu’il a ? et vous que ferez-vous pendant notre absence ?
– Maman, vous avez toujours voulu faire ça Papa et toi, non ?
– Oui, mais…
Son mari lui remit délicatement une de ses mèches derrière l’oreille.
– Et si nous mettions de côté les « mais » et que nous profitions pleinement de ce magnifique cadeau ?
Peu à peu elle sourit. Son regard allait des billets à ses enfants, de ses enfants à son mari, de son mari aux billets. Son sourire se changea soudain en un éclat de rire ! Elle attrapa ses enfants par le cou et les couvrit de bisous.
– Je ne sais pas comment vous avez réussi votre coup, vous deux, mais c’est le plus beau jour de ma vie !


>> D’autres histoires écrites lors de ce challenge